RHOPALOCERA
PAPILIONOIDEA
   
PAPILIONIDAE


Cette famille est par excellence celle des plus remarquables Papillons tropicaux, tant par leur taille impressionnante que par la magnificence chromatique de leur livrée. Cette esthétique leur a valu, avec quelques autres groupes charismatiques comme les Morphos, le triste privilège de finir leurs jours d’imagos dans des cadres décoratifs d’un goût discutable et vendus par millions par les pays émergents à la clientèle des pays émergés (!), industrie ayant désormais l’élevage comme source plus ou moins contrôlée et assurant tout de même quelques ressources « renouvelables » à certaines populations déshéritées. Entre l’emblématique Machaon que tout enfant du siècle passé avait eu la chance de voir survoler les plates-bandes de carottes du potager familial, l’Apollon dont la protection de l’espèce (et non de l’espace...) fut tant médiatisée pour l’honneur du geste, et l’Ornithoptère indo-malais, Papillon-Oiseau trônant dans quelque vitrine d’un commerce peu ou prou équitable, il n’est pas étonnant que les Papilionidae puissent alors habiter l’imaginaire populaire.

Si plus d’un demi-millier de Papillons appartenant à cette famille sont recensés dans le monde (l’Islande et la Nouvelle-Zélande seraient parmi les rares pays non habités par cette famille cosmopolite), à peine quelques dizaines sont afférentes à la zone paléarctique, dix-sept volent en Europe et seulement quatre figurent dans les écosystèmes d’Afrique du Nord. Le genre Parnassius, ayant l’Asie centrale comme origine, fait totalement défaut au Maghreb, en dépit de quelques habitats (notamment marocains) aux affinités post-glaciaires tout autant appropriées que peuvent l’être ceux voisins de la Cordillère Bétique, tant avancés en proue sur l’autre rive méditerranéenne et fréquentés par le genre. Il va sans dire que les entomologistes pionniers avaient quelques raisons de pressentir l’Apolon : « Chose curieuse, bien que M. Vaucher se soit élevé dans la chaîne du Grand-Atlas à une altitude de plus de 3000 mètres, il n’a rencontré aucun représentant du genre Parnassius, ni même du genre Erebia, comme on aurait pu s’y attendre. » relatait quelque peu dépité Charles Blachier en 1908

Entre-autres traits pouvant constituer un « air de famille », les Papilionidae se distinguent par les six pattes fonctionnelles des imagos chez les deux sexes, chaque tarse portant une paire de griffes simples (avec des tibias et des tarses plus ou moins atrophiés et sans griffes, les pattes antérieures ne sont pas fonctionnelles dans les autres familles). Les ailes postérieures, qui ne comportent qu’une unique nervure anale, sont soit festonnées (genre Zerynthia au Maroc), soit caudées (Papilio et Iphiclides au Maroc) et alors porteuse d’une longue queue, d’où le nom vernaculaire de Porte-queue qui leur est attribuée. Tous sont d’habiles volateurs, au vol généralement lent et plané.

Caractère commun à cette famille, les chenilles glabres sont porteuses d’un osmaterium, organe bifide et charnu situé dans le pli entre la tête et le prothorax, répandant une odeur âcre d’acide butyrique, et que la larve dévagine à la moindre alerte, notamment tactile. Chez la larve du Machaon, l’osmaterium contient du carotène et inonde l’adversaire d’un effluve âcre de beurre rance. La chrysalide des Papilionidae maghrébins est obtectée succincte, accrochée verticalement au support par le crémaster et une ceinture de soie céphalique (Zerynthia) ou thoracique (Iphiclides, Papilio).