79-1_AETHERIE

RHOPALOCERA PAPILIONOIDEA
NYMPHALIDAE

Sous-famille Nymphalinae
Genre
Melitaea
(Sous-genre
Cinclidia)

56 Melitaea aetherie
La Mélitée andalouse


Origine et répartition

Atlanto-méditerranéen (ibéro-maghrébin).
Maghreb (dont la Tunisie d’où l’espèce est citée par Oberthür, ainsi que par Chnéour (1954 : 230) de Kroumérie), extrême Sud de la Péninsule ibérique, Sicile.

Type

Melitaea aetherie Hübner, 1826 ; LT : Sud de l’Espagne.

Taxa au Maroc

Melitaea aetherie algirica Rühl, 1892 ; LT : Algérie.
M. aetherie delacrei ssp. nova

Distribution au Maroc

La ssp. algirica est propre au Moyen Atlas dans l’ensemble de son continuum, avec comme localités contemporaines recensées d’est en ouest : Djebel Bou-Iblane (versant Nord, maison forestière d’Achaad), Val d’Ifrane, Tizi-n-Tretten, Mischliffen, Djebel Hebri, alentours d’Azrou (nombreux dèmes), Plateau d’Ito, maison forestière d’Ousmaa, Aïn-Leuh, maison forestière d’Ouiouane, alentours de Timahdite, Tizi-n-Rechou, Tizi-n-Tanout-ou-Fillali, région d’El-Ksiba à Naour, Tizi-n-Ifar, Djebel R. Nim (au sud de Beni-Mellal, entre Timoulilt et Ouaouizarht). Cette courte énumération est le fait de la destruction de nombreuses localités du siècle passé. Exception faite des prairies en défends du Tizi-n-Tretten et d’Ito où la dynamique des populations est encore vigoureuse (avec les aléas des années sèches ou arrosées), les colonies ne sont guère étoffées et ne génèrent le plus souvent que des petits groupes disparates réfugiés sur les ultimes espaces à hémicryptophytes et à géophytes hygrophiles. Une seule référence rifaine illustre le chaînon manquant (Cordillère bético-rifaine) : piémont méridional du Djebel Lakraa, au-dessus de Bab-Taza, cà et là aux abords de quelques mouillères plus ou moins sylvatiques (dans le cortège de Euphydryas aurinia, E. desfontainii, Coenonympha arcanioides) et dans quelques prairies résiduelles (à Zerynthia rumina) où il est raréfié par la mise en culture de Cannabis indica. Répartition verticale : 1200-2000 m.
Le taxon delacrei ssp. nova n’habite que les hauts pâturages humides et les pozzines du versant Nord du Toubkal, notamment sur le plateau de l’Oukaïmeden et aux alentours de l’Azib Tiferguine (et au long de l’asif du même toponime), ainsi qu’aux alentours du village de Tacheddirt. Il devrait être observé en bien d’autres stations idoines du même secteur, notamment en aval d’Imlil. Un peu plus à l’est, il est de nos jours curieusement absent des grandes prairies fraîches du Tizi-n-Tichka, pourtant riches en éléments hygrophiles. Même remarque plus à l’ouest pour les quelques pelouses suintantes des alentours du Tizi-n-Test, pelouses il est vrai en processus de dessèchement. Il n’a pas été rencontré au sein des grandes mouillères du Mont Siroua. Des Centaurées sont présentes dans ces habitats. Cette race est confinnée entre 2500 et 3000 m. En Afrique du Nord, la translation altitudinale est une règle pour les Lépidoptères au fur et à mesure qu’on perd de la latitude (Zegris eupheme qui accompagne M. aetherie depuis les espaces herbifères d’Ifrane jusqu’aux pelouses tourbeuses du Toubkal, est un autre éloquent témoin du phénomène).

Cartographie nationale (2003)

Nombre de mailles 10 x 10 km : 20.

Carte-aetherie


Plantes-hôtes et sources nectarifères

M. aetherie dépend toujours de Carduacées (Asteracées), notamment du genre Cynara, dont les espèces plus ou moins repérées restent à déterminer pour le Maroc. Certaines Centaurea spp. semblent aussi impliquées.
L’adulte, aux goûts nectarifères plus sectaires que ceux de M. phoebe, montre une préférence pour les fleurs bleues et jaunes de Carduacées acaules (à tige courte) et butine censément sa plante-hôte.

Types d’habitats, conservation et attributions bioindicatives

Prairies très humides et florifères, sylvatiques ou non, plus particulièrement situées sur les plateaux, espaces lacunaires et dépressions, comprenant généralement des tourbières. Evite les pentes trop exposées. Bioclimats humide et perhumide du supraméditerranéen dans le Moyen Atlas et du montagnard méditerranéen (plancher de l’oroméditerranéen) dans le Haut Atlas central.
L’espèce est en régression dramatique suite au dessèchement de son habitat sous la pression (imperceptible à l’échelle de la vie humaine) du réchauffement global, exacerbée par les affres du sempiternel surpâturage. Les suites d’années sèches sont évidemment caractéristiques des pays du Maghreb et depuis tous temps compensées par une reprise des pluies générant alors un regain. Pour contrer cet état de chose, les espèces ont développé une adaptation basée sur une prolongation excessive du pouvoir de somnolence (décennies pour les graines de certaines plantes annuelles, deux ou trois années pour la léthargie nymphale de certains Lépidoptères, etc.). Ce que l’intelligence de la nature ne pouvait prévoir est l’imbécillité incommensurable de l’espèce humaine qui désormais entend rajouter aux périodes de déficit hydrique la charge d’un troupeau exponentiel apte au saccage extrême d’écosystèmes en phase sensible. Si bien que lorsque revient la pluie, l’eau tombe sur un sol mort, scalpé de sa strate végétale et de son substrat humique. C’est ainsi l’arrêt de mort des prairies humides et des mouillères qui ne sont pas sous l’effet d’une protection volontariste doublée d’une surveillance sans faille (et non de figures de protection purement conceptuelles, et de périmètres en défends soumis au petit jeu de la corruption). Rappelons que l’essentiel de l’habitat de la forme nominative ibérique, à preferendum fatal car plus particulièrement littoral, s’est vu investi par l’urbanisation gougnafière, les golfs et autres espaces mités par l’économie touristico-récréative inspirée par les agresseurs de la biosphère. N’en déplaise aux instances cosmétiques veillant à ce que l’on protège sur un mode tout aussi intégriste qu’ignorant l’espèce (contre les seuls lépidotéristes !) mais pas l’espace !!!
Dans un tel contexte, au Maroc surpâturé ou en Espagne bétonnée, que peut bien bioindiquer la Mélitée andalouse, espèce clé de voûte pour la biosurveillance des formations herbacées hygrophiles, si ce ne sont les derniers bastions d’un écosystème sur le déclin ?

Phénologie

Monogoneutique depuis les premiers jours de mai (Ifrane) jusqu’au prémices de juillet (Oukaïmeden).

Identité éco-éthologique

Sténoèce exigeant (très faible valence), hygrophile, praticole, montigène (ssp. algirica), orophile (ssp. delacrei), patrouilleur, opportuniste.

Etat de connaissance et statut conservatoire

Bon.

En danger (ssp. algirica), vulnérable (ssp. delacrei).